Miser sur le bien-être au travail, un vecteur puissant d’influence, de compétitivité et d’attractivité pour l’entreprise.
Au XIXe siècle, le Taylorisme n’a fait qu’apporter abrutissement, déqualification et ennui aux travailleurs. La rationalisation des tâches était, à cette époque, un véritable défi avec, comme souci permanent et prédominant, la production et la recherche de rentabilité. Or, le XXe siècle a vu naître une nouvelle vision du travail qui est venue rompre définitivement avec ce que nous avions connu jusqu’alors. Le travail a totalement changé de paradigme pour apparaître désormais comme une démarche de réalisation de soi et d’épanouissement personnel. C’est le point de référence qui occupe une place primordiale dans nos vies. Le travail n’est plus simplement une question de rémunération pour gagner sa vie comme à l’époque du travail à la chaîne. Il est devenu un signe fort de distinction, d’appartenance à la vie sociale, sociétale et économique, ainsi que de reconnaissance. Partant de ce postulat, se sentir bien dans son entreprise est donc apparu tout naturellement comme une nécessité majeure. En cela, si les années 2000 ont fait la promotion du « Work Life Balance » ou de l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, les années 2010 ont marqué quant à elles la valorisation et la nécessité du bien-être et du « bonheur » au travail.
Mais, qu’est-ce que vraiment le « bonheur » au travail ? Cette notion subjective et quelque peu idéaliste, voire naïve, peut faire sourire bon nombre de chefs d’entreprises et de professionnels. Pour autant, il n’en reste pas moins qu’elle possède une grande légitimité au sein de l’entreprise. Cette notion de bien être est d’autant plus importante que les sources de stress et de mal-être se multiplient dans notre contexte actuel. En 2015, deux salariés sur dix (soit 17%) se disaient potentiellement en situation de burn-out et plus de trois sur dix (soit 31%) disaient y être confrontés dans leur entourage professionnel selon une étude de l’Institut Think pour Great Place to Work. Il faut savoir que le sujet du bien-être au travail a émergé en 2005 avec la vague sans précédente très médiatisée des suicides dans de grands groupes français. Course à la productivité, pression accrue, objectifs inatteignables… C’est le mal du XIXe siècle qui touche le monde professionnel, le poussant à en vouloir et en demander toujours plus. Augmentation des arrêts maladies, taux de suicides en entreprise en hausse, apparition de nouvelles maladies dites professionnelles comme le burn-out, le bore-out ou le brown-out, exposition accrue au stress… Les souffrances au travail touchent les salariés de plein fouet.
Or, ce fléau impacte aussi de manière inhérente l’organisation même de l’entreprise. Si la santé de l’entreprise est déterminée en partie par le dirigeant, elle est également liée à la santé de ses salariés. Son impact sur la performance de l’entreprise est encore trop souvent ignoré. Un salarié qui est mal dans son entreprise entraîne inévitablement la production de coûts cachés pour l’entreprise. Démotivation, absence de productivité, coût de la maladie… Selon le baromètre 2013 d’Apicil et de Mozart Consulting, les répercussions d’une mauvaise qualité de l’organisation et du lien social au travail coûteraient « 13 500 euros par an et par salarié soit une perte de valeur ajoutée de 250 milliards d’euros pour l’ensemble du secteur privé ».
Etre une entreprise où il fait bon vivre apparaît donc comme « LE » nouveau défi des chefs d’entreprises qui rivalisent d’intelligence et d’originalité pour être au top du podium chaque année. Plus que jamais, PME/TPE comme grands groupes, ont en effet grand intérêt à investir à leur hauteur dans ce nouveau concept de bien-être au travail, vecteur à part entière de croissance, d’attractivité, de compétitivité et de productivité.
Le bien-être au travail n’est donc pas un gadget superflu initié par le chef d’entreprise pour suivre la mode et le mouvement en marche. Son influence et son importance sont telles qu’aujourd’hui toute entreprise quel que soit sa taille ou son activité peut s’organiser de façon à gagner en bienveillance. Créer un « mieux vivre professionnel » dans l’entreprise n’est pas facile. Ce n’est pas une évidence non plus. Néanmoins, c’est à la portée de tous de miser sur l’Humain dans un souci de pérennité de l’activité.
« Les deux choses les plus importantes n’apparaissent pas au bilan de l’entreprise : sa réputation et ses hommes ». Cette déclaration de l’industriel américain Henry FORD, il y a plus d’un siècle, semble donc plus que jamais d’actualité.